Ilha de Santo Antão : Ribeira Grande et randonnée
Aujourd’hui, c’est rando! Redécouverte de la route de la veille, de Ponta do Sol à Paùl. Yannick Noah et son guide vont vers la montagne.
Soit une douzaine de kms, à flanc de montagne, sur une route pavée toute récente : en effet, elle ne fut terminée et inaugurée qu’en 2009…
Nous n’avançons pas rapidement dans les enlacements de cette voie pavée, mais le paysage, bien que toujours le même au final, s’annonce changeant à chaque sortie de virage. Nous laissons Ponta do Sol et son ancien aéeroport derrière nous, pour mieux les retrouver ce soir.
La construction de la portion de route de Ponta do Sol au conselho de Paùl, à Vilas das Pombas, dura une 10aine d’années.
Enfin, c’est un calcul approximatif de ma part, car je sais que l’ensemble, de Janela à Ponta do Sol, nécessita 20 ans de travaux… Creusement des parroies rocheuses, pose des pavés, c’est énormissime. Si l’on compte toute la route de Porto Novo à Ponta do Sol, soit ce que nous avons parcouru hier en aluguer, c’est 40 ans de travaux qui nous ont été avancés. A vérifier, mais même 30 semblent une éternité!
Des tronçons de route ont été, depuis ou à cause de la nouvelle chaussée, laissés de côté. Certains détails nous échappent encore…
En tous cas, l’action de la nature conjuguée à celle des hommes donne de surprenantes combinaisons, comme ces orgues naturels.
Nous approchons de Ribeira Grande. Les zones plates sont rares, les plages encore plus et lorsqu’il y en a, elles sont vite squattées par des terrains de football! Avec de quoi faire de belles séances d’échauffement avant et d’étirement après la partie!
L’entrée de Ribeira Grande ne dénote pas de par sa beauté. Les constructions sont faites en matériaux du pays et sont donc noires.
Ce qui est surprenant, c’est qu’on ne voit pas la ville depuis la côte : elle est enchassée dans la montagne, à la sortie d’une ribeira.
Les ribeiras sont des rivières, littéralement, mais asséchées. Ou plutôt des torrents, et par extension, des vallées et même des canyons.
Ribeira Grande est la capitale de Santo Antão. La ville fut fondée à la fin du XVIe s. par le Comte de Santa Cruz Mascarenhas, sous le nom de Povoação de Santa -Population de Sainte-, dont elle conserve encore le nom de Povoação à l’usage,
Ce sont des déportés d’Afrique réduits à la condition d’esclaves, mais aussi des juifs, des algarviens, alentejans, açoriens et encore espagnols et italiens qui vinrent peupler ces nouvelles contrées. Santo Antão est de fait très métissée.
L’église, qui est finalement l’une des rares visitées jusqu’ici -la seconde?- est relativement dépouillée, quoi qu’ancienne, ce qui est fort appréciable dans un pays où peu de vestiges coloniaux subsistent, du moins côté constructions religieuses.
La ville, passés les sobrados du centre, est colorée et plutôt de construction contemporaine. Elle compte environ 3000 habitants.
Si les portugais furent les premiers à peupler cette île et l’archipel en général, ce dernier fut atteint par des populations ouest africaines antérieurement et peut êtreplus anciennement encore. On trouve d’ailleurs à Santo Antão des gravures rupestres antérieure à l’arrivée des portugais.
Nous ne les avons pas vues, nous nous sommes concentrés sur ce que l’île nous offrait d’elle même…
En 1935, Auguste Chevalier, professeur au Museum d’Histoire naturelle de Paris, put en observer sur l’île de Santo Antão. Nous, nous observons plutôt les graffitis locaux… Plus accessible!
Ribeira Grande est encerclée de montagnes… La légende veut que, vers 1755, l’évêque de l’île de Santiago vint visiter Santo Antão.
Il voulut traverser l’île et finit par se retrouver coincé entre le vide et une montagne. On lui fit alors parvenir de quoi subsister…
Le temps que les locaux construisent un chemin : ainsi naquit l’une des premières routes de l’île… Depuis, les choses ont évolué lentement, mais elles sont parvenu à évoluer.
C’est l’heure de la relève à l’école, où les élèves vont soit le matin, soit l’après-midi. En uniforme, come il se doit.
Nous, nous devons trouver un endroit pour nous ravitailler. Ribeira Grande n’a pas l’air d’avoir été plus préparée que ça à l’accueil de touristes.
Mais ça se trouve… Un Cantinho da amizade [=petit coin de l’amitié], une omelette et des légumes locaux et ça repart!
De ce côté-ci de la ribeira, nous sommes à Tarrafal, sûrement le Tarrafal de Ribeira Grande, car il y a une localité du même nom à l’autre bout de l’île, l’ancien port avant la construction de Porto Novo. Les lieux portent encore des traces du Carnaval, et non plus de sa préparation, cette fois!
Le lit de la ribeira est là, creusé…
On a du mal à imaginer le torrent dévalant les pentes pour se déverser ici. Et quant on demande quand et comment c’est, toujours la même réponse : « depende », ça dépend…
Nous quittons Ribeira Grande alors que les locaux s’affèrent pour nourrir les porcs. Mais ça, je ne le comprendrai que plus tard.
Sur la plage, des tas de sable. Pourquoi? C’est juste le matériau principal de construction dans les environs.
Pas de pierre, le sable est utilisé pour fabriquer des parpaings.
Les carrières, elles, semblent plutôt avoir servi la construction des routes. Mais bien des détails nous échappent encore.
Tout en avançant, nous croisons des autochtones : le salut est de règle, et c’est aussi raffraichissant que les embruns.
Le paysage est tel qu’au fil des kms, nous ne savons jamais où nous allons arriver.
Sinagoga. Il faut remonter à l’inquisition portugaise pour comprendre le nom de ce village, dû à l’arrivée de juifs à Santo Antão.
Ils y construisirent une sinagogue qui plus tard fut reconvertie en léproserie. Enfin, ça, c’est ce que dit mon guide et la logique, car un local me fait bien comprendre qua ça n’a jamais été qu’une léproserie. La compréhension n’est pas aisée, mais la volonté y est.
C’est un des rares lieux, dans les parrages, où les piscines naturelles permettent la baignade dans l’océan houleux.
Et c’est dans les environs qu’est fabriqué le fameux rhum local… J’aimerais bien voir ça.
Côté football, Sinagoga doit créer des joueurs techniques jouant au sol, ou bien perdre un grand nombre de ballons!
Les maisons les plus anciennes sont les plus colorées, j’ai l’impression. Il y a une espèce de ferveur qui utilise tous les plats pour la construction des habitations, mais on parre au plus urgent ; la peinture sera sûrement pour plus tard. Du coup, on a beaucou de noir.
Ah ben voilà, nous venons de comprendre à quoi servent ces petits enclos déjà croisés…
Chacun à le sien, et même la capitale a son coin dédié à l’élevage.
Boa tarde!
Aucun soupçon, juste une muraille et une rivière asséchée qui arrive de nulle part.
Un petit port de pêche suspendu annonce notre destination. Que d’efforts, au quotidien, pour descendre et monter ces barques!
Vila das Pombas [=Ville des colombes], dans le Conselho de Paùl. Les gens ici parlent de Paùl tout le temps, difficile de s’entendre!
Paùl, c’est le canton, la division administrative et aussi la vallée locale, l’une des plus vertes de l’île, semble-t-il. On y supporte aussi le Benfica de Lisbonne, et on sait y passer du bon temps.
Les noms des commerces ont vraiment quelque chose de différent, ici. Comme ce bar, « So chamar » : il suffit d’appeler!
Le port sur la tête est encore utilisé, mais ça n’est pas une découverte pour moi, tant je l’ai vu pratiquer au Portugal, enfant.
Et le football, encore, prétexte au rassemblement, pour passer un bon moment.
La ville s’étire tout le long de la route, ou d’une rue qui dut être intégrée à la route lors de sa construction, ça paraît plus logique.
Ah, je disais donc…
Mais d’autres assurent un commerce plus chiche, histoire de subsister. Ca nous vaudra une pomme pour le goûter.
La fameuse rivière de Paùl et son Saint Antoine : il faut s’en souvenir, avec ses bouguainvilliers, comme un point de repère.
Ce que nous cherchons pour ponctuer notre randonnée, c’est le cimetière. Drôle d’idée, mais…
Si ça n’est pas le cas de celui-ci, ils ont parfois des situations inédites, avec des vues à couper le souffle.
Dans les prochains jours, nous iront plus loin encore, sur cette route, faire le voyage de 20 ans qui conduisit à sa construction.
Pour l’heure, c’est le moment de s’en retourner à Ponta do Sol. Ici, les chiens grimpent sur les murs…
Et je découvre ce qu’est un régime de bananes sur un bananier!
Nous rentrons avec le dernier collectivo, tandis que les cap-verdiens eux-mêmes, comme ici à Sinagoga, finissent leur journée en sociabilisant, autour d’une bière ou d’un jeu de cartes. Ca a quelque chose de rassurant.
Une journée qui se termine avec la vue depuis notre chambre. Ce soir, nous dînons dans un restaurant bien cap-verdien, chez Vony. Poisson et légumes tropicaux au menu, un grogue velho pour faire passer le tout et dodo : on fait la fête le samedi soir ici comme partout ailleurs, mais nos12 kms de marche ont eu raison de nous, et demain, il faut reprendre!