Ilha de Boa Vista : Cabo de Santa Maria
Nous devons trouver les courriers locaux, l’occasion de traverser une partie de Sal Rei. Elle me fait penser à une friche de tourisme industriel, avec des gens qui avaient tout misé sur le soleil, les sports de vagues, l’argent des étrangers, mais sans le succès escompté, ou du moins pas de cette manière, pas encore.
La ville est assez récente, avec des rues pavées et d’autres où les larges chemins font office de rues entre les quartiers.
Depuis la fin des années 1990, Sal Rei est la ville de l’archipel qui a eu la plus grand taux de croissance démographique. Elle comptait en 2010 près de 6000 habitants. Pour comparaison, l’île comptait un peu plus de 8500 habitants, 4200 en 2000, 3400 en 1990, 3200 en 1960 et 2800 en 1940. De la croissance, donc.
Comme pour les autres îles, des Cap Verdiens sont arrivés d’ailleurs. Kévin, notre taxi, vient lui-même de Santo Antão. Des ouest-africains aussi. Et des investisseurs étrangers. Nous dormons dans un hôtel italien conseillé par des italiens chez qui des français nous avaient aiguyés. Ici, des danois, à priori, avec leur drapeau gay bien caché au fin fond de la ville.
Le Cap-Vert est un pays majoritairement catholique où les moeurs ne changent pas aussi rapidement que dans notre Vieille Europe. Pas encore en tous cas, mais le drapeau vu précédemment est un signe des temps. L’église, sur la grande place, a été à la fin du XXe s. le lieu d’office d’un prêtre français très apprécié.
Nous nous attendions un peu à une ville avec de vagues vestiges coloniaux mais sommes là dans tous ce qu’il y a de plus récent. Avec une iconographie bien surprenante…
Nous avons rendez-vous avec notre taxi à 12H30… Retour à l’hôtel Salinas. Il faudra les voir, d’ailleurs, ces salines, les mêmes qui ont donné leur nom à la ville : Sel Roi. En effet, le sel y était de très bonne qualité.
On est loin de l’architecture coloniale, quand même, hein! Mais tout va bien, c’est le Cap-Vert tel qu’il est aujourd’hui, en plein développement, bon an mal an : c’est intégré. Nous allons attendre Kévin une bonne heure : la ponctualité n’est pas son fort. Il a failli perdre notre réservation mais arrive juste à temps… Et c’est parti, à l’arrière du pick-up.
Nous allons au Cap Santa Maria, où se trouve ce que je veux voir. Pas grand chose, mais de quoi en profiter durant le chemin aussi. A la sortie de Sal Rei, le quartier de Barracas : un bidonville qui concentre 1/3 des habitants de Sal Rei. L’une des dérives due au tourisme.
Nous n’y repasserons pas, nous sommes maintenant dans le désert. Je m’attendais à des dunes, mais le désert est multiple.
Il y a des palmiers partout, ça me fait quand même penser à ce que j’ai vite vu au sud de Marrakech en 2001. Boa Vista produit des dates, pas une surprise en soi.
Nous roulons accompagnés par les sauterelles…
Et passons par des endroits étonnants!
Elles sont pas énormes? Malheureusement, avec les sècheresses, ces bestioles sont épisodiquement un véritable fléau.
Nous continuons, et toujours pas d’océan en vue : à croire que nous nous enfonçons dans l’île. Boa Vista est la 3e par la taille, du Cap-Vert, avec un diamètre d’environ 30 kms.
Vers l’est, à une 10aine de kms, certainement le Monte Calhau, qui culmine à 326 m.
Nous n’avons que 7 à 8 kms à parcourir et voilà presque 20 minutes que nous sommes partis. Nous n’avons croisé que les sauterelles et une ou deux chèvres.
Mais ça y’est, je sens quelque chose, l’horizon est vide, nous approchons.
Nous y voici, à deux pas!
Enfin arrivés… Kévin nous explique que c’est un ancien port, mais si loin de tout et malgré les ruines, j’ai bien du mal à le croire… Je ne discuterai pas.
Voilà ce qui m’intéresse, la seule raison de ce détour par Boa Vista, à la base!
Une simple carcasse de rouille échouée sur la plage.
Mais je ne dois pas perde de vue les alentours…
Nous nous balladons sur une carte postale!
Eau turquoise…
Sable blanc…
Et cette fameuse épave! C’est un bâteau espagnol qui s’est échoué ici le 1er septembre 1968. Toute la côte nord de Boa Vista est très propice aux naufrages : une théorie voudrait que l’activité sismique / volcanique des environs brouille les systèmes de navigation des navires.
Une côte faite par ailleurs de nombreux pièges et hauts fonds…
Autant dire que les navires ont dû apprendre à éviter de passer au large : même le capitaine Cook faillit y rester le 11 août 1776!
Une autre théorie, qui ne s’applique pas ici, veut que l’une des occupations des cap verdiens, durant des siècles, était de provoquer les naufrages afin de piller les cargaisons des navires. Celle de celui-ci ne fit pas exception, à n’en point douter! Cette activité de naufrageur était appelée la mòia. Mòia mise en relation par Jean-Yves Loudes avec la Morna. On y reviendra.
Quant à moi, je multiplie les vues. Nous avons négocié 2H sur place avec Kevin : parce qu’il a été en retard, parce qu’il ne peut nous laisser seul -l’endroit commence à avoir mauvaise réputation-, et parce que nous l’avons fourni en biscuits et eau alors qu’il comptait rentrer déjeuner.
Nous pouvons ainsi faire un plouf dans les piscines naturelles.
Le guide d’un gros groupe arrivé entre temps en quad nous conseille de faire attention au djalo fish, ou yellow fish. Ok, pas très bien compris, ce qui rend la recherche de la menace impossible. Un corypohène ? C’est jaune mais je vois mal ce type de poisson aussi près des plages.
Après mûre réflexion, il faisait plutôt référence aux diodons . Avec l’accent, ça n’est pas si loin même si le guide à dit « baloon fish » ou « balão fish ». Bref. Le plus étonnant est de voir les touristes en quad partir après 2 photos prises à 100 m. 5 minutes et au revoir, tant mieux pour nous.
Nous profitons des vagues, de la vue, de l’eau tiède… Et faisons un peu fi du consel reçu, il est vrai.
Kévin nous dit qu’il a déjà vu le ciel si bleu ici que ce dernier et la mer se confondaient. Pour nous il est partagé entre sable et bleu.
Et voilà, retour à Sal Rei… C’était un moment tout simplement formidable! En un sens, il ne faut pas grand chose, même si ça nécessite d’aller traverser un désert au beau milieu de l’Atlantique!
De retour : il est temps de manger un minimum, faire les boutiques de souvenirs, un passage obligé… Ici aussi de nombreuses boutiques du genre sont tenues par des sénégalais.
Et puis nous commençons à prendre notre train train local…
… Dans une ville aux multiples visages où les petites résidences ont remplacé les maisons traditionnelles. Ainsi, les rares qui existent encore nous servent à nous repérer dans ce dédale de rues à angles droits. Nous avons prévu de terminer la journée avec une visite du cimetière juif. Un but qui nous fait passer par les salines.
Dès 1542, les anglais venaient s’y servir le plus simplement du monde. Puis, comme à Sal, Manuel Antonio Martins rationalisa leur exploitation dès 1796, avec un apport d’esclaves. Elles fermèrent en 1979. Il n’en reste plus grand chose, mais c’est tout de même l’occasion de découvrir ce que sont ces grands palmiers déjà croisés. Leur forme parfaite me gênait, et pour cause, s’agissant d’antennes de télécommunication!
Il est 17H30, il nous reste peu de temps avant la tombée de la nuit. Non que les environs ne soient pas sûrs, mais pour les photos, il faut de la lumière…
Et près de l’hôtel Marina, nous tombons sur le fameux cimetière recherché. Vers 1870, quasiment un siècle après le règne sans partage de Manuel Antonio Martins sur Boa Vista, la famille séfarade Ben’Oliel, venue de Rabat, accostait et prospérait. Aujourd’hui, une partie de l’île lui appartient encore, même si la famille, qui vit à New-York, n’y a plus de descendant direct.
Le petit cimetière, un enclos qui abrite 4 à 5 tombes, est monument national. Sur ce… Cerveja, jantar, grogue e cama!