Ilha do Fogo : Grande Pico
Vue la soirée de la veille, le réveil a été dur : 5H30 pour les plus matinaux des randonneurs, 6H00 pour l’autre couple qui fait partie de l’expédition du jour. Le départ se fait donc à 6H30 après un petit déjeuner qui fait du bien et ravitaillement obligatoire en eau. C’est parti, voyons voir!
Je n’oserai donner le nombre de photographies prises ce jour, mais la sélection a été extrêmement difficile.
Non que les photos soient belles ou toutes belles, telles ce figuier, mais comme il est question de raconter une histoire aussi complète que possible, et en images plutôt qu’en mots…
Beaucoup de photos pour cette belle aventure, donc!
Nous allons monter en même temps que le soleil, au milieu des vignes pour entamer l’ascencion. C’est Dinis, un frère de José, qui nous accompagne. 80€ l’excursion pour tout le groupe.
Pour le beau temps, je crois que c’est peine perdue, mais il faudra faire avec! Au loin, Chã das Caldeiras et déjà 3/4H de marche.
Nous montons par le versant nord du Grande Pico. Un peu plus au nord, un cône adventif sorti de terre en 2014.
En dessous, une mer de nuages.
Et le soleil qui joue à cache cache.
Inutile de dire que je retarde l’expédition, mais ça permet aussi de reprendre son souffle.
Et puis on ne fait pas ça tous les jours… Je ne vois pas l’intérêt de monter nez collé aux pentes et me retourne donc plus qu’à mon tour.
Forcément, l’appareil photo suit quasi instantanément mon mouvement! 1H de marche.
L’essentiel reste encore à faire mais on en prend déjà plein la vue.
Un petit résumé géologique de l’histoire de Fogo?
Fogo est l’île la plus jeune du Cap-Vert, les plus anciennes se trouvant à l’Est de l’archipel.
La remontée de roches qui a donné naissance à l’archipel est active depuis 22 à 24 millions d’années…
Fogo a commencé à se former sous l’océan il y a seulement 4,5 millions d’années.
Cette première phase fut suivie de la formation du Monte Barro. 2H de marche à ce point.
Suite au Monte Barro, c’est le Monte Amarelo qui apparut, constituant la 3e phase de la naissance de Fogo. Celle-ci prit fin il y a 73 000 ans dans un gigantesque glissement de terrain provoquant un mégatsunami de 170 m. de haut, raz de marrée qui frappa essentiellement l’île voisine de Santiago.
Ce même tsunami est à l’origine de la caldeira de Fogo : le Grande Pico a commencé à y croître…
Pour remplir à ce jour une caldeira de 2000 m. d’épaisseur. Ce qui correspond à son altitude actuelle.
Le Grande Pico et l’île de Fogo sont un stratovolcan, soit un volcan qui s’est formé par strates, elles mêmes faites de coulées de lave
Survéillé depuis le XVe s., le Grande Pico est entré 30 fois en éruption.
Jusqu’en 1769, les éruptions se produisaient à son sommet. Depuis, c’est sur ses flancs que celles-ci ont lieu.
1785, 1799, 1847, 1852, 1857, 1951, 1995 et 2014.
En 2014, l’éruption a commencé le 23 novembre. Le volcan n’a cessé son activité que 77 jours plus tard, le 8 février 2015.
Ici, à environ 2H30 de marche.
Il semblerait qu’en dehors du monde lusophone, les éruptions de ce volcan passent complètement inaperçues.
Pourtant, deux villages ont quasiment été rayés de la carte en 2014 : Chã et plus bas, Portela.
Sur son flanc est, ici à droite, le volcan n’a rien qui le retienne et tout se déverse des pentes de l’île vers la mer. Nous sommes au sommet, côté nord, au bout de 3H de marche depuis Chã. Il est 9H30. Epoustoufflant, non? Nous sommes à près de 2830 m. Temps pour des photos -encore-, petit repos et en-cas.
Nous retrouvons, tout en haut, le couple espagnol croisé la veille. Dans le cratère, des visiteurs ont laissé leur nom avec des pierres. Nous n’y descendrons pas. Il faut respecter le volcan… J’ai lu quelque part que l’éruption de 1995 ou 2014 avait fait suite au tournage d’un clip vidéo dans le cratère. On y croit?
Ca sent le soufre, et ça ne veut pas dire que ça sent bon! Dommage : pour capter la fumée en photo, c’est galère sans pause longue.
Nous longeons désormais le sommet afin de passer sur la pente ouest du volcan.
Au Sud, presque 3000 m. plus bas, on aperçoit la mer et on devine quelques vagues. On voit aussi très bien, dans la caldeira, comment la route pavée qui vient de São Filipe a été coupée par une coulée de lave en 2014 : net et sans bavure. Il est 10H40.
Au Nord Ouest, le village de Chã das Caldeiras. Je commence à comprendre pourquoi on leur a donné des toits blancs.
Nous sommes à flanc de montagne pour le moment, il ne faut pas tomber mais des rampes faites de cables sont prévues. Des interstices de la terre, à travers les pierres, sort de la fumée : ça sent fort et c’est chaud.
Tout en bas, le Pequeno Pico [petit pic], celui né durant l’éruption de 1995. Toute les coulées noires sont de 2014. En fonction de leur couleur, les coulées de lave sont plus ou moins anciennes. Les plus foncées sont les plus récentes.
Si l’on en croit ses couleurs, le sommet du volcan n’est donc pas concerné par les dernières éruptions. On parlait d’avant 1769?
Nous sommes désormais 6 + 2 guides, et vigilence il faut garder. Notre but? La gueule béante du Pequeno Pico! 11H15.
La roche et la caillasse font place aux scories. On avait beau m’en avoir parlé, j’étais très très loin de m’imaginer comment se déroulerait la descente… Il suffit de sauter en se laissant attirer vers en bas. Un pur délire!!!
Dinis ne semble pas être en reste quant au plaisir, malgré le nombre d’ascencions qu’il a déjà dû effectuer… Pause dans les scories.
Il est bien difficile, à mi pente, de savoir à quoi s’attendre, tout en bas.
Quant aux scories dans lesquelles nous sommes enfoncés jusqu’à mi-mollets, c’est tout simplement ça.
Certains descendent en luge, ce doit être possible en snowboard, mais la descente en courrant est quand même sacrément grisante! Ca crie de partout et mieux vaut se freiner pour ne pas être en bas trop vite! Ici, c’est « Campiões » pour Dinis!
Et voilà… Trop court…
30 minutes plus 10 minutes de pause, il est 11H49. Nous sommes tout en bas, au Pequeno Pico. Et là, après les sensations fortes de la descente, place aux couleurs…
Aux mouvements ou à leurs traces, à l’activité de la terre et à la chaleur…
Maintenant, le spectacle est à nos pieds.
Enfin, il l’était déjà, mais nous avions dû prendre de la hauteur!
Par endroits, j’ai l’impressin de voir des tortues, tant les rochers ont été torturés par la chaleur, au point d’éclater!
Au loin, l’ancienne route, et là, devant nous, les entrailles de la terre, et cet air chaud qui arrive par bouffées.
Notre descente n’a pas été sans laisser de traces… Mais le Grande Pico a l’habitude, je doute que ça le chatouille, même…
Le Pequeno Pico, en revanche, j’hésiterais à le chatouiller… C’est qu’il en a dégueulé de la lave!
Une lave qui a tout rasé et brûlé sur son passage.
Et il est comme prêt à recommencer.
On se sent vraiment tout petit.
J’ai fait le forcing pour faire un tour du Pequeno Pico, sans quoi tout le monde rentrait direct à Chã. Ca aurait été dommage! Ca m’aurait aussi évité de rouler sur les pierres, dans un moment d’inattention : peau d’un mollet bien entamée, d’un bras aussi, lunettes rayées, fallait y aller, mais l’essentiel est sauf : l’appareil photo!
Allé, je cède… Place au retour, mais toujours en queue de file, forcément.
10 ans, c’est selon la légende le nombre d’années dont on rajeunit en allant tout là-haut. Dinis ne doit même pas être né!
Et voilà qu’il se décide à faire beau. Moi qui déteste les cieux laiteux…
Tant pis, et puis de toute manière, je n’en finis pas de m’émerveiller, de m’attarder puis de courrir pour rattraper le groupe.
Mais attention aux maisons enterrées à peine déménagées…
Nous voilà à Chã. Il est 13H. Je n’en peux plus et finirai ma journée par une énorme sieste, un repas du soir et une tentative de comprendre l’awalé. Sans succès!
Tout ce que je veux, c’est me reposer et rêver. Ca fait quand même beaucoup de belles choses pour un seul jour!
Laisser un commentaire