Alto Rabagão et alentours
10H30. Depuis les collines surplombant Ladrugães, je prends conscience que je dois composer ma journée en fonction du soleil.
Ce dernier se lève relativement tard -plus tôt que moi néanmoins…- et disparaît dès 17H30! Les journées vont être courtes. Me voici donc dans la vallée, à Vila da Ponte, la ville du pont à ne pas confondre avec son homonyme au sud de Vila Real. Après avoir traversé ses étroites ruelles, me voici devant le fameux pont…
Sur la route, j’ai croisé des panneaux qui en font un pont médiéval, et d’autres, plus artisanaux, qui en faisaient un pont romain. Avec ses 3 arcs, dont le plus grand en ogive, il appartient à la première catégorie. Contexte et décor fort bucolique, quoi qu’il en soit : je me régale.
La région est peuplée depuis la préhistoire, et de nombreux éléments témoignent de cette présence humaine ancienne. Ce pont est considéré comme le premier construit sur le Rabagão, la rivière qu’il enjambe, une rivière capable de fortissimes crues, si l’on en croit les saillies en amont de l’ouvrage.
La signalisation marron, destinée aux touristes, est très présente dans la région : peut-être un bon indicateur pour moin séjour improvisé. Je zappe pourtant la route du blé et ses moulins pour le moment. Retour sur mon itinéraire, traversée de Vila da Ponte et son centre typiquement trasmontano fait de maisons et greniers à épis en granite souvent âgés de plusieurs siècles.
Temps d’une collation où, la veille et sans avoir été conquis, j’ai goûté à la salsicha alheira . Il s’agirait d’une saucisse à l’ail, originellement composée de plusieurs viandes, sauf porc. Elle aurait été mise au point par les maranes, ces juifs convertis ou nouveaux chrétiens réfugiés dans la région pour échaper à l’Inquisition, à partir du XVe s. Depuis la terrasse, vue sur la retenue du Alto Rabagão.
J’ai quelques souvenirs de passages au bord de ce lac, petit, soit pour son immense digue qui barre le paysage, soit pour son lit asséché, et je crois, un village abandonné tout au fond. Aujourd’hui, tout est mis à contribution pour produire de l’électricité : vent comme on l’a déjà vu, eau et, ici, soleil sur une superficie équivalente à la moitié d’un terrain de football…
La digue de béton culminant à 880 m. d’altitude mesure quasiment 2 kms tout en alliant plusieurs techniques -gravité et arcs-. Elle atteint 94 m. de hauteur et fut construite entre 1957 et 1964. C’est, par sa taille, le deuxième barrage du Portugal. C’est dans cette vaste retenue artificilelle -22 km²- que les copains pêchent.
Tout ça me ramène à l’endroit où j’ai grandi, en Aveyron, et son lac de Pareloup aux proportions plus modestes -12km² avec un barrage de 230 m de long, 47 m de hauteur, mis en service en 1951. Les paysages ont également quelques points en commun, quoi que l’Aubrac soit pour le coup plus évident dans mes souvenirs.
En revanche, il y a peu de chèvres en Aveyron, et encore moins de loups, la bête crainte que le gardien me dit encore présente quand je plaisante sur la taille de son chien…
Ce sont des chèvres à viande : on ne fait pas de fromage, dans la région. C’est plutôt vers Guarda, dans la Serra da Estrela, qu’il faut descendre pour en goûter. Le gardien insiste : c’est une très bonne viande, et d’ailleurs, il en exporte. Echange sympatique, les gens prennent le temps… Peut-être moins pour ma part, pressé d’aller sur les hauteurs.
2017 fut pour moi l’occasion d’un superbe voyage au Cap-Vert , puis de quelques mois forts chargés de travail. Ici, au grand air et dans les couleurs automnales, sous ce soleil presque d’hiver, je respire!
Me voici au sud du lac du Alto Rabagão, à environ 1000 m. d’altitude, sur les hauteurs du Barroso, la région dont le principal village porte d’ailleurs le nom : Alturas do Barroso.
Un de ces villages en granite. Le jour de notre arrivée, sous la pluie de lourds nuages, c’était assez lugubre. Plus facile de s’y aventurer sous le soleil.
Déambulation dans les ruelles, et l’impression de tomber sur une maison du village d’Astérix! Elle est bien gardée, quoique par un doux molosse dans ce cas, qui semble être un représentant des Chiens de montagne portugais, originaires de la Serra da Estrela. Ce serait l’une des races les plus anciennes de la péninsule.
Plus loin… Evidemment, même pour quelques centaines d’âmes, une église n’a pas suffit, il fallait encore -au moins!- une chapelle.
Retour sur le lac…
Vraiment pas le Portugal dont j’ai l’habitude! Je ne sais si c’est la race en question, mais aux XVII et XVIIIe s., le cheval portugais était surnommé « cheval des rois ». Il reste aujourd’hui encore très apprécié pour son allure et son caractère.
Vilarinho de Negrões, village qui a échappé à la mise en eau du lac. Il devait être bien perché, à l’époque!
Au loin, là-haut, une espèce qui m’est chère, croisée aussi, dans mon enfance, en Aveyron : des VTT : vaches tous terrains.
Un espigueiro annonce l’entrée à Vilarinho de Negrões (=noirauds, de la couleur de la pierre?)…
Ca n’est pas commun, je suis dans les animaux… Bon, les poneys ne se mangent pas plus ici qu’ailleurs.
En plus de l’ambiance fantastique de l’avant veille, le temps gris m’aurait évité les ombres de cette fin d’après-midi, mais ce beau temps est finalement plus agréable.
Le village conserve quelques habitants, mais est pour l’essentiel abandonné. Gageons qu’il se repeuple comme par magie au mois d’août!
A ce rythme-là, j’aurai bientôt passé toute la faune domestique en revue!
Je n’aime pas trop les chiens, et les chiens portugais n’y sont pas étrangers. Souvent des chiens de garde attachés près des maisons, ils aboient au moindre mouvement. De plus, je les ai toujours trouvé laids, convaincu que c’étaient des bâtards. Celui-ci pourtant serait issue d’une race ancienne, celle de Castro Laboreiro, du nom d’un village montagnard du Minho.
30 secondes avant ce cliché, je me faisais refuser une photo que je n’avais pas sollicité. En voyant mon appareil, une vieille veuve tout de noir et traditionnellement vêtue, cacha son visage, commençant à maugréer. Il est vrai que c’était tentant, mais voilà qui démontre aussi l’une des dérives du tourisme à laquelle tente de s’ouvrir la région.
Certes, les gens… Mais je ne m’y fais pas, ou n’ose pas. Negrões.
Paysages et archi sont bien plus « faciles », encore faut-il tomber au bon endroit au bon moment… Et ça? Curieux, ce clocher, non?
Depuis les champs de choux, c’est un clocher comme un autre.
L’après-midi tire à sa fin, la lumière est basse et vive, je ne vais pas tarder à devoir rentrer. C’est un peu frustrant.
Je ne suis toutefois pas le seul, et vu ce que je croise, mieux vaut que je n’extériorise pas trop ma frustration! Troupeau de race Mirandesa, je crois, qui rentre à l’étable : race de vaches à viande qui, comme la Barrosa, a vu un grand déclin de ses effectifs avec la concurrence des races limousine et charolaise, de croissance plus rapide.
Et voilà une 1e journée motorisée terminée. La région a bien quelques curiosités et du potentiel, reste à savoir comment je vais les exploiter à mon avantage sans trop tourner en rond. Mais là, il est l’heure du goûter : direction Venda Nova pour un pastel de nata , puis retour à la maison, où N et C ont rapporté leurs 3 premières perches, pêchées par le premier. Dîner tout trouvé : parfait!
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